jeudi 21 mars 2013

Sur la manifestation de Ouargla, un article qui montre bien tous les aspects de fond traversant le mouvement social en Algérie.

Cet article est tiré du magazine "Algérie confluences". Sur l'échiquier politique, il se situe très à gauche. Tous les aspects y sont contenus : situation sociale, aménagement du territoire, tension entre nord et sud, qui permettent à mon humble avis d'appréhender la situation politique algérienne.
                                                                                                  

A OUARGLA LES JEUNES CHÔMEURS ONT FAIT PREUVE DE CIVISME ET DE PATRIOTISME

 L’unité nationale, la ligne rouge !

Jeudi, à Ouargla, les jeunes chômeurs, menés par leur charismatique et populaire Tahar Belabbès, ont d’abord montré qu’ils avaient de la suite dans les idées, de l’énergie et du souffle. De l’abnégation et de la persévérance aussi. Du sang froid également. Et suffisamment pour ne pas répondre directement aux multiples accusations d’être des jouets dociles aux mains de marionnettistes étrangers.

ILS ÉTAIENT VINGT ET CENT, ils étaient des milliers, voire plus, peut-être moins. Mais, qu’importe finalement le nombre ! Qu’importe le flacon de la manif, pourvu qu’on ait l’ivresse du succès. Et, à Ouargla, la marche des jeunes chômeurs, dite du “million”, par référence aux rassemblements gigantesques de la Place Ettahrir au Caire, fut une réussite évidente. C’est un succès, parce que la manifestation a pu avoir lieu. Encore plus probant du fait même du caractère pacifique du rassemblement.

En effet, il n’y a pas eu d’affrontements avec les forces de police qui se tenaient à distance respectable et l’atmosphère du rassemblement s’en est trouvée alors plus détendue. Du coup, les jeunes chômeurs ont pu dérouler leurs banderoles, clamer leurs slogans et exprimer leurs revendications sociaux-professionnelles.
Dans le calme et dans une ambiance bon enfant. Un bon point donc pour les autorités qui n’ont pas cédé cette fois-ci à leur obsession sécuritaire et au syndrome du gourdin.
Et bravo aux jeunes chômeurs dont beaucoup de diplômés, qui ont fait preuve, à l’occasion, d’un sens élevé du civisme et du patriotisme. Et qui ont fait aussi, indirectement, la démonstration forte de leur sens de la politique. Jeudi, à Ouargla, les jeunes chômeurs, menés par leur charismatique et populaire Tahar Belabbès, ont d’abord montré qu’ils avaient de la suite dans les idées, de l’énergie et du souffle. De l’abnégation et de la persévérance aussi. Du sang froid également.
Et suffisamment pour ne pas répondre directement aux multiples accusations d’être des jouets dociles aux mains de marionnettistes étrangers. Des experts de labos interlopes qui les auraient manipulés, du moins les figures de proue du mouvement, pour les inciter à pousser le Sud à se séparer du Nord et faire de leur mouvement le ferment et le creuset d’un “printemps arabe” en Algérie.
Symboliquement, sur la Place de la Libération (ettahrir en arabe), celle du 27 février 1962, date correspondant au soulèvement de la population de Ouargla contre les tentatives coloniales d’amputer l’Algérie de son Sahara, les chômeurs ont arboré l’emblème national et entonné Qassaman tout le long de la manifestation.

Les pancartes et les banderoles étaient encore plus explicites : “l’Algérie au coeur” et, surtout, “l’unité nationale, une ligne rouge”. C’était là une belle démonstration de patriotisme. Une réponse cinglante à toutes les personnes atteintes de “complotite aigüe”, qui voyaient derrière chaque jeune, un conspirateur étranger. C’est le cas notamment d’une trotskyste qui ne l’est plus restée tellement. Une ouvriériste internationaliste qui a pourtant vocation à défendre les travailleurs, mais qui fait des chômeurs qui demandent “s’il vous plait, un job”, des agents de l’étranger voués à la déstabilisation de l’Algérie et à sa division. Misère de la politique et paranoïa aigüe !
Sous l’impulsion de Tahar Belabbès, du syndicaliste de Laghouat Yacine Zaïd et du targui de Tamanrasset Abdelmalek Aïbek, le mouvement, c'est-à-dire le Comité national de défense des droits des chômeurs (CNDDC) a fait le choix intelligent de ne pas se placer dans une optique de pure politique. A l’instar du Mouvement des enfants du Sud pour la justice (MESJ) qui fut dans l’ambiguïté politique, certains de ses animateurs revendiquant un Sud indépendant, à tout le moins autonome.

D’ailleurs les radicaux finiront par succomber aux sirènes du djihadisme terroriste en créant le MESJI, c'est-à-dire un Mouvement des enfants du Sud pour la justice… islamiste !
D’ailleurs, son leader Mohamed Bencheneb aurait été tué lors de l’attaque contre le complexe gazier de Tiguentourine en janvier dernier ! Avec Tahar Belabbès et les autres, le mouvement a su faire de la noble politique en limitant son action à la quête de la dignité individuelle qui passe par un combat collectif pour l’emploi. Cette façon de faire a permis au mouvement de ne pas être un simple mouvement local, dépassant largement les limites de Ouargla, ville symbolique car étant limitrophe de Hassi Messaoud, symbole de la rente pétrolière. Le mouvement a su éviter ainsi le confinement dans une sorte de ghetto saharien dans lequel on a voulu le cantonner. Non sans avoir tenté de le discréditer, de le diaboliser même et de le réprimer. En lançant contre lui une sainte trinité : la force répressive, le glaive de la justice et la propagande de médias à la solde. En vain. Car les jeunes chômeurs du Sud sont des Algériens. Des patriotes et des personnes sensées, raisonnables et intelligentes. Et c’est cela qui a fait d’eux une force tranquille.


Par Norredine Khelassi

16-03-2013

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