DIRECTIONS
POUR UNE APPROCHE MARXISTE DU DROIT : LA THÉORIE GÉNÉRALE DU DROIT
D'E.B.PACHUKANIS.
Léon Loiseau introduit son travail en
revenant sur le malaise entre marxisme et droit en se penchant sur l’approche
qu’ont eu les théoriciens en la matière, se basant essentiellement sur les Thèses sur Feuerbach. C’était pour eux
la catégorie centrale de l’idéologie
bourgeoise, se confond avec la religion comme l’expression et la résolution
fantasmée de conflits dont la vérité se trouve dans la sphère sociale de
production. Le droit comme la religion s’organise autours d’un discours, d’un
corpus de texte et de rituels. Pour certains, ce n’était qu’une mise en scène
qui a une efficacité idéologique (tout comme la religion). Si on dénonçait
l’idéologie bourgeoise, le droit tomberait de lui-même vu l’équation idéologie
= droit.
Pashukanis
va remettre en cause cette égalité en renversant la méthodologie. Là est selon
auteur l’apport majeur d’E. B. Pashukanis.
Pour
Pashukanis, le droit est une relation sociale effective, un phénomène réel,
matériel, non idéologique en son essence mais n’empêchant pas le développement
d’une idéologie juridique. Pour L. Loiseau, cette analyse a une
conséquence : « l’idéologie
juridique et les théories bourgeoises du droit, celles de l’école moderne du
droit naturel plus particulièrement, deviennent des matériaux utilisables.
Elles expriment la vérité du phénomène juridique ».
Pashukanis
irait donc à « contre-courant » : là où certains font de
l’idéologie juridique une sous catégorie de l’idéologie bourgeoise, lui en fait
un outil participant à la construction d’une pensée marxiste.
Léon
Loiseau résume le postulat de base de Pashukanis en une phrase : le droit
est un concept qui permet de décrire le rapport social qui naît quand des individus
opposent leurs intérêts privés sur le fond d’une égale capacité reconnue de chacun
à chacun de faire valoir ses intérêts. C’est pour lui, un concept riche dans sa
compréhension et étroit dans son extension.
A
mon humble avis, cette synthèse est un bon postulat pour l’analyse mais pas si
étroit dans son extension… C’est juste une question de vocabulaire : au
lieu d’ « individus », mettre « personnes » (concept
juridique en lui-même, il permet d’englober les personnes privées comme
publiques, physiques comme morales) et mettre « intérêts propres (ou
personnel) » à la place d’ « intérêts privés » (on intègre comme
cela les relations sociales privés, comme celles qui sont publiques) permettrait
d’avoir une meilleure compréhension.
Cela
permettra de répondre aux différentes problématiques que L. Loiseau soulève
pour Pashukanis : son concept s’applique-t-il au droit privé, quid du
droit pénal, public, etc. Si ce n’est qu’une relation sociale, où est la
dimension normative ?
Ceci
dit, il ne faut pas oublier que Pashukanis conceptualise sa théorie dans une
période historique où l’on se demande encore si on peut inviter une personne
morale à déjeuner (dixit Léon Duguit), où la plus part des Etats n’ont pas de
Constitution, où l’on pensait la période féodale comme un désert juridique.
Deuxième
point de son introduction, pour Léon Loiseau, Pashukanis s’appuie sur Marx pour
définir le droit comme un phénomène de la société bourgeoise, c'est-à-dire
d’une société articulée autour du phénomène de l’échange, il concrétise un
rapport social spécifique.
Léon
Loiseau pose comme problématique : si Pashukanis développe une théorie autonome
du phénomène juridique en le liant uniquement à l’échange, est-ce que le droit
ne devient-il pas un synonyme de l’échange ?
Pour
l’auteur, il n’en n’est rien : la théorie de Pashukanis engage toute la
problématique de la base et de la superstructure, elle forme la réalité, le
propre des phénomènes sociaux.
(Je reprends le plan du texte de Léon Loiseau).