mercredi 24 octobre 2012

La place de la science dans la société 3/3

L’accès à la science pour tous était une conception révolutionnaire, elle ébranlait les fondements religieux de la cité, elle a valu à Socrate sa condamnation à mort.

Quels sont les changements intervenus pour les chercheurs ?

Les changements sont rapides et très inquiétants. Jamais la paperasse n’a été aussi envahissante. La pratique des contrats à court terme amène les chercheurs à mobiliser leurs forces pour obtenir des contrats puis d’autres contrats, au détriment de la recherche proprement dite. Les jeunes font un long parcours du combattant comme allocataires, assistants provisoires ou postdoc en espérant un poste permanent, et s’ils ont la chance d’être recrutés ils entrent dans un système où l’instabilité est programmée : c’est la politique générale de la recherche qui est en cause, avec Lisbonne et l’économie de la connaissance, avec la Loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) bien mal nommée, avec l’Agence nationale de la recherche (ANR) qui focalise les énergies, juste en ce moment, pour en obtenir des contrats, et avec la chasse aux contrats européens.
La réaction à ces changements dans le milieu se situe entre révolte et résignation. La révolte a eu lieu il y a 4 ans, avec la naissance du mouvement Sauver la recherche. En apparence, l’atmosphère est à la résignation : pour vivre et avoir les moyens de travailler, il faut bien passer sous les fourches caudines. Mais la révolte gronde sous la cendre ; elle peut être, ou non, un ferment de conscience politique pour mettre en cause le système actuel et le capitalisme lui-même.

La course à l’excellence avec la politique des laboratoires et initiatives d’excellence fausse la pratique de l’évaluation : l’évaluation peut être le paravent d’une entreprise de démolition. De cela le milieu prend conscience. Un signe parmi d’autres : le conseil scientifique du CNRS lance un cri d’alerte sur les conséquences négatives de la création des nouvelles structures telles que Labex et Idex sur l’ensemble de la recherche en France 

La place de la science dans la société 2/3

L’accès à la science pour tous était une conception révolutionnaire, elle ébranlait les fondements religieux de la cité, elle a valu à Socrate sa condamnation à mort.
 
Peut-on parler de la science ? Doit-on parler des sciences, au pluriel ?

On doit, bien sûr, parler des sciences différentes, et de leur spécificité. On insiste à juste titre sur les SHS, sciences de l’homme et de la société. Les disciplines scolaires donnent une image de la diversité des sciences, d’autant plus qu’en France elles sont bien séparées. Quand on pense aux développements les plus marquants du siècle dernier, c’est à des sciences nouvelles qu’on songe : la physique quantique, l’astrophysique, l’informatique, la biologie moléculaire.  Peut-on dans ces conditions parler de « la science » ? Oui à mon avis. Toutes les sciences ont un commun, un certain exercice de la raison, c’est-à-dire de la mémoire, de l’imagination, de l’esprit critique, de l’aptitude à la mise en forme, que l’on peut appeler la méthode scientifique sans chercher par là à trop la formaliser. Elles ont en commun, sous des formes diverses, le besoin de communiquer. Ensemble, elles constituent un système coordonné de connaissances, et c’est ce système, en évolution constante, qu’on peut appeler la science.
Il y a des analogies profondes entre la science et la politique. Il y a bien des politiques, à différents niveaux, pour différents objets, correspondant à différents intérêts. Mais la politique est une notion générale qui a sa valeur, et qu’il nous incombe de valoriser. Ce que Victor Hugo a écrit sur la science me paraît parfaitement pertinent, plus même que ce qu’il a écrit sur l’art. La science est imparfaite, toujours en mouvement, elle recherche mais n’atteint jamais la vérité, elle se construit en se détruisant sans cesse, mais, dit Victor Hugo, « vénérons cette servante magnifique ». La politique que nous voudrions mener, elle aussi, doit être une recherche permanente, un système coordonné mais sans cesse en mouvement, au service des peuples présents et à venir.
Dans toute vision large de la politique il me semble que la science a sa place.
Y a-t-il divorce entre la science et la société ?

La question mérite examen, et d’abord d’être elle-même questionnée. On ne pose pas la question du divorce entre la finance et la société. Pourquoi ? C’est que quels que soient les griefs de chacun à l’égard de la finance, la société est actuellement structurée par elle. Elle inspire la politique, elle est omniprésente dans les média, elle s’impose comme constitutive de la société où nous vivons. La science n’a pas ces privilèges. Et quelle que soit la sympathie que l’on porte à la science, et quel que soit le rôle qu’elle joue dans la conscience commune et dans la vie sociale, elle n’est pas partie constitutive de notre société. Elle n’inspire pas la politique actuelle, elle est absente des média, la question du divorce avec la société est donc pertinente, relativement à la situation que nous vivons.
Après Hiroshima, et devant la menace d’une guerre atomique, la science n’était pas mise en cause, et seuls quelques esprits inquiets, les marxistes Bernal en Angleterre et Langevin en France, mettaient en garde contre le retard de la conscience commune à prendre en compte les ressources et les dangers du développement de la physique. Dans l’ensemble, la période que nous appelons en France les Trente glorieuses a été une époque de grande confiance dans la science. Mais le retard n’a pas diminué, il s’est augmenté au contraire des avancées scientifiques et de leurs usages au bénéfice du capitalisme. Faute de mettre en cause le capitalisme, certains mettent en cause la science. La correction peut venir en partie des scientifiques, de la manière dont les sciences sont enseignées, de la manière de les présenter, mais l’essentiel de la correction viendra de la politique si nous parvenons à en changer le cours. En attendant, l’idée de l’appropriation collective des connaissances scientifiques peut utilement faire son chemin.

La place de la science dans la société 1/3 ( Par Jean-Pierre Kahane)

L’accès à la science pour tous était une conception révolutionnaire, elle ébranlait les fondements religieux de la cité, elle a valu à Socrate sa condamnation à mort.

Science et société est un thème éternel. Cependant c’est dans les années 1980 qu’il a pris forme avec l’ASTS, l’association science-technologie-société, dont l’initiateur a été René Le Guen. Ainsi, au départ, c’est une vision politique.Cette vision politique s’inscrivait dans l’accès de la gauche au pouvoir. La culture scientifique faisait l’objet d’un  programme mobilisateur. Les organismes de recherche se voyaient confier la mission de la répandre. Cependant, dans l’optique des scientifiques, la diffusion de la culture scientifique n’entraînait pas une vision claire de la place de la science dans la société.

Le thème « science et société »  dans les congrès scientifiques apparaît à ma connaissance au cours des années 1990. À l’Académie des sciences, le comité « science et société » a été créé en 2000. C’est aujourd’hui, en France et dans tous les pays du monde, un thème important pour les scientifiques : quelle est la place de la science dans la société ? Il est grand temps que cela redevienne un thème important en politique, et en particulier dans la politique communiste.

Que recouvre-t-il au cours des temps ?

On fait remonter à Socrate la conception de la science comme objet d’étude pour tous les citoyens. En Mésopotamie et en Egypte, certaines connaissances avaient été acquises, en particulier en astronomie, mais elles étaient détenues par des spécialistes, souvent les prêtres,  au même titre que les recettes magiques. L’accès à la science pour tous était une conception révolutionnaire, elle ébranlait les fondements religieux de la cité, elle a valu à Socrate sa condamnation à mort. L’accès de la science à tous a été une idée forte de la Renaissance, et l’imprimerie y a joué un rôle essentiel.  Cependant la pratique des savants était de conserver pour eux leurs découvertes. Le lien entre découvertes et communication des découvertes date du XVIIe siècle, avec la création des académies, et il a été l’un des traits marquants du progrès des sciences depuis cette époque.Tenue secrète ou largement diffusée, comment la science interagissait-elle avec la société ? J’y reviendrai, mais en gros la science était au service des puissants, ou de ceux qui aspiraient à la puissance. En Europe, le progrès des sciences a accompagné celui du capitalisme, en Italie au XVIe siècle, en Angleterre au XVIIe, en France au XVIIIe, en Allemagne au XIXe et aux États-Unis au XXe.En même temps, la science apparaissait comme liée aux mouvements d’émancipation des peuples : la Révolution française a mobilisé les savants, comme la révolution soviétique.

mardi 23 octobre 2012

Les députés PCF- Front de gauche ne voteront pas la loi de programmation des finaces publiques 2012 -2017.

Explication de vote d'André Chassaigne.

Nous achevons la discussion du projet de loi de finances pour 2013 dans un contexte économique et social marqué par l’accroissement des difficultés.

Pour la France, le FMI prévoit désormais une croissance économique de 0,1 % cette année contre 0,3 % attendu par le gouvernement, et surtout de 0,4 % seulement en 2013, moitié moins que le chiffre retenu dans le projet de loi de finances que nous examinons.  Dans la note de conjoncture publiée la semaine dernière, les économistes de l’OFCE sont catégoriques : la France n’atteindra pas les 3 % de déficit public en 2013. Au mieux, il s’établira à 3,5%. Selon leurs prévisions, la croissance atteindrait 0,1% en 2012 et 0% en 2013.

Vingt-neuf économistes, interrogés par Reuters, vont dans le même sens, prévoyant de leur côté un déficit à 3,5% pour une croissance de 0,3%.   
Malgré ces prévisions convergentes, vous persistez à vouloir faire revenir les déficits publics sous la barre des 3% l’an prochain. C’est une entreprise dangereuse, car si l’objectif inatteignable doit   être atteint coûte que coûte, ce sera au  prix réajustements brutaux, évalués à plus de 20 milliards d’euros, qui risquent de plonger un peu plus l’économie française dans la récession et, au bout du compte, d’accroître encore l’endettement public, comme le montrent les exemples de l’Italie, de l’Espagne ou encore de la Grèce. 

Qui dirige le CAC 40 ? par Gérard Steiff

Qui sont les dirigeants des sociétés cotées à l'indice CAC 40 de la Bourse de Paris ? Qui peuple les états-majors (exécutifs) des grands groupes capitalistes et les conseils d'administration ? Plusieurs enquêtes, études et thèses récentes permettent de préciser le profil de ces capitalistes de 2012 ; on y voit comment les gens de la finance envahissent tout, comment aussi l'État se privatise et « donne » ses hauts cadres ; comment se reconstitue, se régénère la classe dominante, un groupe étroit, fermé, d'individus dont la cooptation se prépare dès les « grandes » écoles.

Le dirigeant d'entreprise du CAC 40 est un mâle quinquagénaire, formé dans une des trois grandes écoles que sont l'ENA, HEC ou Polytechnique, et assez souvent, aussi, issu du haut appareil d'État. C'est ce qui ressort d'une étude de l'OPESC (Observatoire politico-économique des structures du capitalisme www.opesc.org). Quatre de ses chercheurs, François-Xavier Dudouet, Erix Grémont, Hervé Joly et Antoine Vion ont procédé à une « radiographie des comités exécutifs du CAC 40 ». Selon leur définition, l'état-major, ce sont « les collèges situés au sommet de la hiérarchie de l'entreprise, soit le comité exécutif ou son équivalent (directoire, direction générale, comité de direction) ». Ils ont planché sur près de 500 personnes.
Ce sont essentiellement des quinquagénaires mâles. On sait que dans les conseils d'administration, un quota de femmes a été recommandé. Ce n'est pas le cas dans les comités exécutifs où leur nombre est ridiculement faible : 33 femmes pour 420 hommes. Ces dirigeants sont, pour les trois quarts, des Français ; le quart restant sont des Américains (5%), des Allemands, des Belges et des Italiens (près de 3% chacun). Autre caractéristique : la spécificité du système français des grandes écoles. Longtemps, le dirigeant d'entreprise a eu une formation de droit ou d'ingénieur ; aujourd'hui, ce sont des « commerciaux », des « financiers », des diplômés d'HEC, de l'ESSEC ou de l'ESCP, souvent associés à un passage par l'ENA alors que Polytechnique continue d'être recherché. Nos auteurs écrivent : « Au delà du constat immédiat, ce sont les modes de légitimité pour accéder au pouvoir économique qui sont peut-être en train de changer.

lundi 22 octobre 2012

Monde arabe : où en est-on ?

Un article du secteur international du PCF

Il y a 18 mois, plusieurs peuples du monde arabe se soulevaient pour mettre un terme à des décennies de dictatures et de pouvoirs autocratiques jusqu’alors soutenus par les puissances occidentales.

Depuis, pour certains de ces pays, des élections ont permis la mise en place de nouveaux gouvernements, comme en Tunisie et en Égypte. Pour d’autres, comme au Yémen, au Bahreïn, au Maroc, l’action se poursuit, malgré la répression, pour des sociétés démocratiques. En Libye, le pouvoir encore fragile tente d’établir un état de droit, malgré les velléités des milices armées.

Que penser de cette période écoulée ?

L’enthousiasme suscité par les révolutions s’est peu à peu dissipé pour laisser place à un sentiment d’inquiétude sur l’avenir.

D’abord, ce sont, il y a un an, les succès électoraux remportés par les partis religieux en Tunisie et en Égypte, partis pourtant absents des manifestations ayant abouti à la chute des anciens régimes. Ce sont ensuite les agressions répétées de groupes salafistes contre des femmes, des syndicalistes, des journalistes, des artistes. Ces événements vont à l’encontre des espoirs suscités, d’autant que les gouvernements refusent de condamner fermement ces actes et d’appliquer la loi contre leurs auteurs. Mais la résistance civile pacifique, déterminée, à ces groupes factieux, ne cesse de s’élargir.

Car nous n’avons pas affaire à des sociétés, que ce soit en Tunisie ou en Égypte, où les peuples sont disposés à suivre aveuglément de tels groupes. Loin de là. C’est aussi vrai pour ces partis religieux, comme Ennahda en Tunisie ou les Frères musulmans, qui ont été élus dans un rapport de force, favorisé par la division des formations progressistes. Or, l’exercice du pouvoir par ces partis religieux suscite de plus en plus de mécontentement dans les populations au plan social, où rien n’a réellement changé.

Création d'une banque publique : la Commission européenne bloque l’initiative citoyenne

En juillet dernier, 7 personnalités européennes*, dont Pierre Laurent, ont déposé une proposition d’initiative citoyenne européenne pour la création d’une banque publique européenne exclusivement destinée au financement de services publics et d’investissements industriels garantissant un haut niveau de droit pour les salariés et une ambition de transition écologique. La Commission européenne a bloqué la procédure deux mois plus tard…

Une campagne de proximité pour un haut niveau de proposition politique.

Lors de son dernier congrès, en décembre 2010, le Parti de la gauche européenne (PGE), mesurant l’importance de la crise et les risques populistes et xénophobes a considéré qu’il était de sa responsabilité de formuler des propositions concrètes de sortie de crise et de refondation de l’UE. Il a décidé de promouvoir l’idée d’une « Banque publique européenne axée sur le développement social, écologique et solidaire » à travers la procédure d’Initiative citoyenne européenne (ICE).

Les évolutions de la crise financière et bancaire, ainsi que les conséquences des politiques d’austérité sur les peuples, ont chaque jour renforcé la nécessité de se confronter à la finance. Face à l’austérité permanente et à la confiscation des souverainetés populaires, dont le Traité budgétaire est un des fers de lance, notre proposition était – et est toujours – de relancer l’investissement public dans des projets sociaux et industriels et de favoriser l’intervention des citoyens dans le débat sur la construction européenne.

Derrière l’idée d’une banque publique européenne, il y a une grande ambition de refondation de l’UE. Cette idée remet directement en cause le rôle et les missions de la Banque centrale européenne, qui aujourd’hui prête aux banques privées – parfois à des taux très bas – et refuse d’utiliser ce pouvoir de création monétaire au service de l’emploi, du développement des services publics, de la transition écologique. De par sa mission de financer le développement social, écologique et solidaire, son fonctionnement démocratique faisant intervenir notamment des élus, des acteurs économiques et des représentants syndicaux et son mode de financement par le produit d’une taxe sur les transactions financières, une contribution du budget européen et par des prêts de la Banque centrale européenne, cette banque publique européenne représenterait un outil novateur susceptible d’apporter une réponse concrète et progressiste à la crise.

jeudi 11 octobre 2012

Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, débat avec la député Karine Berger du PS sur le TSCG et la politique du gouvernement.


Le débat TSCG: Pierre Laurent - Karine Berger... par Mediapart


Ratification du TCSG : "Une mauvaise action contre la démocratie et contre l'idée européenne."

La semaine dernière, lors de son intervention à la tribune de l’Assemblée nationale, le premier ministre avait fini par lâcher le morceau en reconnaissant que pas une seule ligne du traité budgétaire européen signé par Sarkozy et Merkel n’a été modifiée.

Après des semaines bien peu glorieuses pour l’exécutif, embarqué dans une ratification sans débat, privant nos concitoyens et concitoyennes d’une juste information leur permettant de se forger leur propre opinion, sans la moindre prise en considération des propositions des forces progressistes (politiques, syndicales et associatives) mobilisées contre l’austérité, la ratification du TSCG ce jour à l’Assemblée nationale est une mauvaise action contre la démocratie et contre l’idée européenne. Triste spectacle.

Avoir été élus sur la base du « changement, c’est maintenant ! », pour se retrouver, cinq mois plus tard, au côté de la droite sur un sujet aussi essentiel et structurant, constitue une faute qui, tôt ou tard, aura un prix politique. En s’opposant à cette ratification, les 17 députés PS qui n’ont pas oublié cette promesse ont fait le bon choix, celui du respect de la parole donnée. L’abstention de 14 députés de gauche souligne aussi un grand malaise car la vérité est têtue : l’austérité est en échec partout en Europe avec une flambée du chômage, une destruction massive des emplois, une aggravation des conditions de vie, une saignée des peuples pour satisfaire les marchés financiers.

La bataille se poursuit au Sénat où Pierre Laurent présentera, dès demain, des perspectives européennes pour sortir d’une crise qui vire à la récession. Alors que l’on nous parle de plus en plus de "choc", "choc budgétaire", "choc de compétitivité", dans un climat où les tensions réapparaissent dangereusement, le seul "choc" attendu est celui d’une rupture avec une orientation injuste et inefficace.

Olivier Dartigolles, 
Porte Parole du PCF,
9 octobre 2012.