Explication de vote d'André Chassaigne.
Nous achevons la discussion du projet de loi de finances pour 2013
dans un contexte économique et social marqué par l’accroissement des
difficultés.
Pour la France, le FMI prévoit désormais une
croissance économique de 0,1 % cette année contre 0,3 % attendu par le
gouvernement, et surtout de 0,4 % seulement en 2013, moitié moins que le
chiffre retenu dans le projet de loi de finances que nous examinons.
Dans la note de conjoncture publiée la semaine dernière, les économistes
de l’OFCE sont catégoriques : la France n’atteindra pas les 3 % de
déficit public en 2013. Au mieux, il s’établira à 3,5%. Selon leurs
prévisions, la croissance atteindrait 0,1% en 2012 et 0% en 2013.
Vingt-neuf économistes, interrogés par Reuters, vont dans le même sens, prévoyant de leur côté un déficit à 3,5% pour une croissance de 0,3%.
Malgré
ces prévisions convergentes, vous persistez à vouloir faire revenir les
déficits publics sous la barre des 3% l’an prochain. C’est une
entreprise dangereuse, car si l’objectif inatteignable doit être
atteint coûte que coûte, ce sera au prix réajustements brutaux, évalués
à plus de 20 milliards d’euros, qui risquent de plonger un peu plus
l’économie française dans la récession et, au bout du compte,
d’accroître encore l’endettement public, comme le montrent les exemples
de l’Italie, de l’Espagne ou encore de la Grèce.
Nous n’avons de
cesse de tenter de vous convaincre que c’est la croissance qui nous
permettra de réduire nos déficits, et non l’inverse. Dans le contexte
actuel, marqué par un niveau record du chômage et une situation de
l’emploi qui risque encore de se dégrader l’an prochain, nous jugeons
déraisonnable de faire de la réduction du poids de la dette l’unique
priorité.
C’est pourtant l’orientation prise par le projet de loi
de programmation, qui prévoit à cet effet de nouvelles réductions
d’effectifs dans la fonction publique, 2% en moyenne d’ici 2015, de
nouvelles coupes dans les dépenses de fonctionnement des ministères, 5%
d’ici 2015, un quasi-gel des investissements, la réduction des concours
de l’Etat aux collectivités locales de 750 millions d’euros par an à
compter de l’an prochain…
Les efforts budgétaires consentis sur
les missions jugées prioritaires représentent bien sûr une avancée, mais
ils restent prisonniers d’une logique étroitement comptable.
Nous
retrouvons la même inspiration, la même hantise du déficit, dans votre
stratégie fiscale. Si nous nous félicitons de la volonté de mettre à
contribution les revenus des contribuables aisés et des grandes
entreprises, qui furent les grands bénéficiaires de la gestion
calamiteuse de la précédente majorité, rien ne justifiait de maintenir
le gel du barème de l’impôt sur le revenu que François Hollande s’était
engagé à supprimer et qui va se traduire, malgré la décote, par une
augmentation significative de l’imposition de plus de dix millions de
nos concitoyens.
Nous regrettons en outre que vous soyez
demeurés, sur bien des sujets, au milieu de gué. Sur l’ISF, sur la
réforme du barème, sur le taux marginal d’imposition… vous avez reculé
enfin devant les protestations des prétendus « pigeons », ces champions
de la plus-value à court terme, au risque de compromettre la mise en
œuvre du principe que toute la gauche appelait de ses vœux, à savoir
l’alignement de la taxation du capital sur celle du travail.
Nous
ne pouvons que constater au terme de l’examen de la première partie du
PLF, que la véritable révolution fiscale, qui se fixerait pour objectif
de combattre les inégalités, de pénaliser la croissance financière des
capitaux, de lutter contre la fraude et l’évasion fiscale, demeure
d’actualité. Vous n’avez pas donné de suite favorable à nos amendements
et êtes demeurés, comme l’exprimait notre collègue Nicolas Sansu,
« l’œil rivé sur la ligne bleue des 3%. »
Nous voterons en
conséquence contre le projet de programmation et exprimons les plus
vives réserves sur le projet de loi de finances lui-même. Nous nous
abstiendrons sur cette première partie, dans l’attente d’évolutions
significatives.
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