Ce n’est pas de sécurisation de l’emploi dont il est question à chaque ligne du projet d’accord national interprofessionnel élaboré par le MEDEF. La sécurisation n’y est conçue qu’au profit des entreprises, pour se prémunir de toute obligation de transparence et de justification, et se constituer une véritable immunité judiciaire.
La revendication n’est pas neuve ; elle a déjà servi de fil rouge à l’ensemble des positions patronales des 15 dernières années et a connu déjà plusieurs succès, avec le mécanisme de la rupture conventionnelle obtenue des partenaires sociaux puis du législateur en 2008, ou la pratique des plans de départs volontaires qui se répand elle aussi sans aucun contrôle judiciaire possible.
Mais le MEDEF n’entend pas s’en contenter, et réclame désormais le droit :
- de museler les représentants du personnel en leur imposant la confidentialité sur les informations qu’ils reçoivent, et des délais préfix pour entendre leur expert et rendre leur avis ;
- de subordonner le maintien du CDI à la réalisation d’un projet, transformant ainsi le CDI en CDD ;
- de licencier sans avoir à justifier d’un motif économique le salarié qui aura refusé une modification de son poste ou de son lieu de travail dans le cadre d’une réorganisation, et de s’exonérer par là même de toute mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi et des règles encadrant le licenciement économique ;
- de licencier sans contrôle les salariés refusant les modifications de leur rémunération ou de leur temps de travail issues des accords dits « de maintien dans l’emploi », en se libérant là aussi de toutes les règles propres au licenciement pour motif économique ;
- lorsque l’obligation de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi n’aura pu être contournée, de s’affranchir par accord collectif de toutes les règles encadrant sa présentation, ou de se prémunir de tout contrôle judiciaire sur ce plan par le jeu d’une homologation de l’administration du travail pouvant être simplement implicite ;
- de se prémunir de toute contestation quant à la validité ou la justification de leurs décisions, en tous domaines, en cas de violation des règles de procédure et de formalisme édictées par le code du travail pour encadrer le pouvoir de décision des employeurs (Exit la requalification de nombre de CDD pour absence de motif, exit la requalification des temps partiels pour absence de fixation de l’horaire, exit la nullité des licenciements économiques pour défaut de plan social, exit les garanties procédurales conventionnelles spécifiques, etc…) ;
- de compenser a posteriori l’indigence de la motivation des lettres de licenciement ; de plafonner le risque ;
- financier des litiges par une barémisation des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- d’échapper encore et enfin à tout contrôle judiciaire et risque de sanction par des délais de prescription exceptionnellement brefs.