vendredi 7 octobre 2011

Dette publique et crise financière : Sortir de l’Euro est-ce une solution à la crise ?

Le constat :
Si les critiques de gauche au Traité de Maastricht en 1992, principalement celles du PCF à l'époque, étaient justifiées, comme l'ont été celles émises en 2005 par le PCF et le mouvement altermondialiste face au TCE, il serait par contre réducteur et trompeur de faire d'un "sortir de l'euro" le préalable voire le sésame magique d'une sortie de crise.

En 1992 les économistes communistes et d'autres, défendaient la proposition d'une "monnaie  commune", instrument de coopération face au dollar notamment, contre le choix d'une "monnaie unique" au service de l'unification sous la double férule de la "concurrence libre et non faussée"( dumping fiscal, dumping social, démantèlement des services publics, ...) et d'une politique et d'institutions de l'euro (BCE) conçues en fonction et au service d'un financement de l'économie par les marchés financiers.

Déjà à l'époque la question était "A quoi doit servir la monnaie, à la fois dans chaque pays et au service de quel projet européen?

C'est cette même question qui est posée aujourd'hui, avec plus d'acuité. La question ne peut pas se limiter à "Faut il sortir de l'euro?" mais "Quelles transformations monétaires en Europ pour une monnaie et une création monétaire utile à une sortie de crise? Et donc au service de quelle transformation sociale en France et en Europe?". La réponse a cette question n'est évidement pas seulement de technique monétaire mais également de processus politique et social à développer pour rendre possible cette transformation.


Les limites politiques d'un "Sortons de l'euro"

Dans un contexte où les réflexes nationalistes et xénophobes se développent en Europe, ce retour de chaque pays vers sa monnaie nationale risquerait surtout d'exacerber de nouvelles formes de guerre économiques, notamment sous forme de dévaluations compétitives, etc... Au dumping social et fiscal s'ajouterait un dumping monétaire. Pas vraiment une réponse donc au besoin de nouvelles coopérations! Et surtout pas une réponse à la domination des marchés financiers pouvant encore plus jouer des rivalités et différences entre pays dans les spéculations, les taux d'intérêts, etc... !

Les limites économiques et monétaires

La dette contractée en euros sur les marchés internationaux de capitaux (les 2/3 de la dette française par exemple) resterait libellée dans cette monnaie pour le ou les pays sortants de l'euro. Non seulement leur nouvelle monnaie nationale connaîtrait une dévaluation volontaire (l'objectif des partisans d'une sortie de l'euro étant notamment de retrouver une compétitivité prix à l'exportation par une dévaluation monétaire) mais la dette ancienne libellée en euro exploserait.

A une échelle bien moindre, des ménages polonais, croates, hongrois, affrontent aujourd'hui la difficulté d'être endettés avec une monnaie qui n'est pas la monnaie nationale. Attirés par des banques et des taux d'intérêts bas, ils ont contracté pour plus de 80 milliards de dettes li - bellés en franc suisse. Aujourd'hui, avec un franc suisse qui bat tous les records (avec une hausse de 10% en moyenne depuis mai ), les montants des remboursements explosent. L'emprunt et ses remboursements (libellés en francs suisse) finissent par dépasser, et de loin, la valeur initiale des biens financés. Ce sont aujourd'hui les banques qui les saisissent.

On peut bien sûr penser combiner une sortie de l'euro avec un mouvement massif d'annulation des dettes, mais chaque pays étant revenu vers sa propre monnaie et en guerre économique avec les autres, cette annulation de dettes aboutirait plutôt à des faillites bancaires en chaîne et non maîtrisées.

Ajoutons que ce débat sur la sortie de l'euro a des analogies avec le faux débat de l'année 1983 entre partisans à l'époque d'une "autre politique" en sortant du SME ( Chevènement, Bérégovoy, quelques grands patrons, ...) et la tendance Mauroy-Delors pour le maintient dans le SME.

Le vice et la limite de ce débat étaient que dans les deux cas les sacrifices étaient pour le monde du travail, dans un cas la "rigueur" pour se maintenir dans le SME, et dans l'autre cas, les conséquences d'une dévaluation sur les salaires, les dépenses publiques, ...., avec une course à la compétitivité par les prix à la clé.

Enfin, et c'est évidemment une question qui a pris de l'importance au fil de ces décennies, s'en remettre aux seules monnaies nationales, c'est renoncer face à l'impérialisme du dollar dans les relations économiques internationales.

Pour une réponse offensive de transformation de l'euro

Il n'y a pas de raccourci (encore moins par la sortie d'un seul pays de l'euro, (ou des pays les plus en difficultés financières), et à froid) au combat pour une transformation de la construction européenne, incluant une transformation de l'euro.

Le mouvement des indignés, mais aussi les évolutions de la CES, montrent qu'il existe des forces considérables en Europe qui peuvent se mettre en mouvement et converger. "S'affranchir des marchés financiers" peut être un vecteur rassembleur, de même que la création d'un Fonds Européen, non pas pour rassurer les marchés, mais financer dans l'économie réelle des actions visant à un nouveau type de développement, d'emploi, d'activités, ... Il convient également de reposer en grand la question de la démocratie. Ce n'est pas seulement une question de pouvoir des États vis à vis des marchés. La question est celle du pouvoir des peuples face aux marchés et donc d'une transformation des pouvoirs.

L'ensemble des propositions qui sont les nôtres, transformation de la création monétaire, audit de la dette, réévaluation de la part des richesses orientées vers le travail, pôle public du crédit et bataille pour une refonte des statuts de la BCE, jusqu'à la question d'une transformation du FMI et du développement à partir des droits de tirages spéciaux (DTS) d'un outil monétaire mondial face au dollar, peuvent alors s'inscrire dans cette dynamique.

Une réponse qui unit changement en France et transformation de la construction européenne, réévaluation de la place du travail dans l'économie et démocratie, lutte contre les gaspillages du capital et le productivisme et émergence de biens et services, écologiquement soutenables et émanciper d'une logique de course à la rentabilité. La transformation de la monnaie et donc de l'euro étant un outil au service de ce changement.

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